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Léo Ferré
Không rõ

Christie

Christie, quand je t'ai vue plonger
Mes vergues de roc où ça cogne,
Des feuilles mortes se peignaient
Quelque part dans la Catalogne.
Le rite de mort aperçu
Sous un divan de sapin triste,
Je m'en souviens. J'étais perdu.
La Camarde est ma camériste.

C'était un peu après midi.
Tu luisais des feux de l'écume.
On rentrait dans la chantilly
Avec les psaumes de la brume.
La mer, en bas, criait ton nom,
Ce poudrier serti de lames
Où Dieu se refait le chignon
Quand il se prend pour une femme.

Christie, mon encre Waterman
Me fait ton mousse d'algue douce.
La mort est comme un policeman
Qui passe sa vie à mes trousses.
Je prendrai le train de marée
Avec le rêve de service
A dix-neuf heures GMT
Vers l'horizon qui pain d'épice.

Christie, du tort et du malheur,
Christie, perdue des revoyures,
Nous nous reverrons sous les fleurs
Qui, là-bas, poussent des augures.
Tout mes chevaux viendront te voir.
Au fond de moi, quand tu voudras,
Ils te traîneront dans l'espoir,
Comme tu traînes dans mes bras.

Je fais tes bars américains
Et je mets tes squales en laisse.
La mort aboit dessous mon bien.
Elle nous laissera son adresse.
Je suis triste comme un paquet
Sémaphorant à la consigne.
Quand donnera-t-on le ticket
A cet employé de la guigne

Pour que nous partions dans l'hiver ?
Des brebis mortes, au vent qui bêle,
Mangent du toc sous les feux verts
Que la mer allume sous elle
Avec des yeux d'habitants louches
Qui nagent dur dedans l'espoir,
Beaux yeux de nuit, comme des bouches
Qui regardent des baisers noirs.

Christie, quand tu viens de la mer,
Tu m'envoies ton odeur genièvre.
Ca bêle dur dans ce désert.
Les moutons broutent sur tes lèvres
Et ta houle les entretient.
Leur laine tricote du large
De quoi vêtir les yeux marins
Qui, dans tes vieux songes, déchargent.

O lavandière du jusant,
Les galets mouillés que tu laisses,
J'y vois comme des culs d'enfants
Qui dessalent tant que tu baisses.
Ils frôlent un peu de l'horizon
Ta parallèle à peu près jointe
Et c'est un peu, de ta maison,
Ta lumière qui s'est éteinte.

Christie, ça sent le poivre doux
Quand ton crépuscule pommade
Et que j'enflamme l'amadou
Pour mieux brûler ta chair malade.
O, ma frégate du palier
Sur l'océan des HLM,
Ta voilure est dans l'escalier.
Reviens vite que je t'emblème.

Toi, dont l'étoile fait de l'oeil
A ces astronomes qu'escortent
Des équations dans leur fauteuil
A regarder des flammes mortes,
La galaxie a pris le deuil
Depuis que ton étoile chante
Et que, dans le fond de tes lèvres,
Toute l'Espagne se lamente.

hainam4u @ Last updated 21/11/04 22:42
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